jeudi 6 août 2020

Bitume

J’aurais sans doute dû conserver un jeu un peu surréaliste pour cette quarante-deuxième et dernière chronique de #1jour1jdr et finalement, peut-être que Bitume entre dans cette case… Alors allons-y gaiement. 


Bitume est un jeu post-apocalyptique à l’origine écrit par Croc et Noman, et qui a connu pas moins de six éditions, d’abord chez « Futur Proche », puis chez Siroz. Le système de jeu de Bitume reposait – pour ces six premières éditions – sur une série de talents exprimés en pourcentages. Rien de bien révolutionnaire de ce côté, et ça restera vrai pour la septième édition actuellement en préparation chez Raise Dead Editions, qui sera motorisée par le système « à la mode » en ce moment : celui de Chroniques Oubliées… 
 
Si Bitume s’inspire très fortement de Mad Max, l’esprit potache caractéristique des productions de Croc reste très présent. Si vous cherchez un jeu pour explorer la vacuité de l’existence dans un monde détruit, il vaut mieux chercher ailleurs : ici, il est question de réunir sa bande et d’explorer une France dévastée par le passage de la Comète de Haley (si si, ça fait des dégâts, une comète). Le tout au volant de véhicules à moteurs dont l’essence vient… à vrai dire, on ne sait pas trop d’où elle vient. Du biofuel, très certainement. 
 
Bon, vous l’aurez compris, Bitume est un jeu défouloir, à pratiquer entre amis histoire de rigoler un coup et de lâcher la pression, le tout avec un stock de « roteuses » (bière) sous la main. A vrai dire, je pense qu’il y a tout à fait moyen de faire du « vrai » Mad Max avec ce jeu, mais pour notre part, ça ne nous a jamais traversé l’esprit. 
 
Voilà, ceci clôture mon « run » de #1jour1jdr

mercredi 5 août 2020

Miles Christi

Pour cette quarante-et-unième capsule de #1jour1jdr je vais vous parler d’un jeu assez ancien qui a eu une aventure éditoriale finalement assez brève (un livre de base et quatre suppléments), sans vraiment connaître le succès, et s’est échangé sur le marché secondaire à des prix fort bas jusqu’à ce qu’un épisode du podcast de la Cellule le remette à l’honneur : il s’agit de Miles Christi.
 

Miles Christi est encore un de ces jeux qui était beaucoup trop avant-gardiste pour son temps. A l’époque où il est sorti, la plupart des rolistes qui l’ont pratiqué n’ont finalement retenu de ce jeu que son background particulièrement bien fouillé, même s’il était focalisé sur une période très brève de l’histoire : la période des croisades, plus précisément entre 1170 et 1190. 
 
Dans Miles Christi, on joue des Templiers, donc des moines soldats qui ont effectivement ces deux qualités et doivent composer avec celles-ci dans un contexte difficile, car la tentation du péché est grande, dans le levant.
 
En se focalisant ainsi sur une période et des personnages très spécifiques, les auteurs de Miles Christi ne se sont probablement pas facilité la vie. Cependant, au final, c’est probablement ce qui lui permet aujourd’hui d’avoir un certain succès d’estime. Car après tout, on vit à une époque où il est tout à fait envisageable de publier avec succès un jeu sur des policiers religieux mormons (Dogs in the Vineyard) ou sur des femmes aviatrices soviétiques pendant la deuxième guerre mondiale (Night Witches)…
 
Question système, Miles Christi innove également puisqu’il utilise (comme Château Falkenstein) des cartes à jouer plutôt que des jets de dés pour résoudre les conflits et les tests.
 
Mais le point le plus important de ce jeu, ça reste sa phase de confession, qui donne l’occasion aux personnages d’avouer leurs péchés, et surtout de rapporter les péchés des autres au père confesseur. Sachant que la progression des personnages est directement liée à leur vertu, cette phase de jeu a une saveur particulière, dont se souviennent tous ceux qui ont essayé ce jeu.

mardi 4 août 2020

Spirit of the Century

Pour ce quarantième épisode de #1jour1jdr je vais vous présenter un jeu qui traîne dans ma ludothèque depuis un moment déjà et que j’ai eu l’occasion de maîtriser pour la première fois dimanche dernier : Spirit of the Century. 

Alors, on va commencer par un petit bout d’histoire, car avant de vous parler de ce jeu, il faut que je vous parle de FUDGE, un système qui trouve ses racines dans les années 90. Plus qu’un jeu, FUDGE est une sorte d’outil de game design qui permettait au maître de jeu bricoleur de créer son propre jeu de rôle à partir d’une mécanique centrée autour de niveaux de compétences et de difficultés allant de -2 à +8, valeurs qui correspondent à des adjectifs du genre médiocre, moyen, passable, bon, excellent, etc.

Pour déterminer le succès ou l’échec d’une action, on compare la compétence adéquate, modifiée par le lancer de quatre dés spéciaux, avec le niveau de difficulté requis. Les dés FUDGE sont des dés à six faces, dont deux faces indiquent "+", deux faces "-" et deux faces sont neutres. Ainsi, par exemple, imaginons qu’un personnage est bon (+3) en conduite et qu’il doit faire une manœuvre qui l’emmène à pleine vitesse dans une ruelle étroite (difficulté +4) : il lance les dés qui donnent -, neutre, + et +, soit un total de +1, ce qui amène sa compétence à +4 et lui permet de réussir la manœuvre. 

Bon, bon, mais quel rapport avec Spirit of the Century ? Les plus sagaces d’entre vous auront deviné que ce jeu est une variante de FUDGE et ils auront raison. Mais ce jeu est plus que cela, car à ma connaissance, c’est un des tous premiers jeux (si pas le premier, vu que la première édition anglaise date de 2006) à être motorisé par FATE. 

FATE se base sur la mécanique centrale de FUDGE et y ajoute une couche de mécanique avec l’apparition des aspects (pour être tout à fait complet, je me dois de souligner qu’un mécanisme du même genre existait déjà dans le jeu Burning Wheel, édité en 2002). Les aspects sont des petits descriptifs purement narratifs qui donnent de la substance aux personnages et qui vont pouvoir être invoqués par les joueurs lorsque les circonstances le permettent, moyennant le paiement d’un point de destin. 

Ainsi, reprenons notre exemple précédent et imaginons qu’au lieu d’un +1, c’est un -1 que notre protagoniste aura obtenu sur son dé, ce qui fait qu’il va probablement crasher sa voiture dans la ruelle. Mais le perso a comme aspect « accro de la vitesse » sur sa feuille de personnage, et le joueur peut décider d’invoquer cet aspect, moyennant le paiement d’un point de destin, pour lui donner un +2, et finalement battre la difficulté. 

Le système de FATE conseille de formuler les aspects de façon à ce que ceux-ci aient un potentiel positif et négatif, ce qui va permettre au maître de jeu de les "contraindre" lorsque les circonstances le permettront, en offrant au joueur un point de destin en échange. Ainsi par exemple, notre accro de la vitesse de l’exemple précédent pourrait se retrouver contraint d’accepter de régler un différent avec un PNJ quelconque lors d’une course automobile. 

Le système de Spirit of the Century permet donc de mettre en scène des aventures où les héros auront des moments où ils brilleront, compensés par des moments de faiblesse et des tuiles monumentales, ce qui est finalement le propre de toutes les bonnes histoires. 

Question contexte, le jeu met en scène des aventures très « pulp » dans l'entre deux guerres, avec un mystérieux « Century Club » qui regroupe toutes les personnes qui sont nées le 1ier janvier 1901, et qui représentent de ce fait l’esprit du vingtième siècle.

lundi 3 août 2020

Chateau Falkenstein

Pour ce trente-neuvième épisode de #1jour1jdr je vais revenir sur l’autre jeu de Mike Pondsmith, l’auteur ultra connu du jeu de rôle Cyberpunk : il s’agit de Château Falkenstein.
 
Castle Falkenstein (en V.O.) est un jeu qui a été publié en 1995 par R. Talsorian Games, et qui a pour cadre une Europe alternative, à l’époque victorienne, avec de la magie, des fées et des machines à vapeur. On est donc dans un cadre « steampunk ». D’un point de vue éditorial, le jeu présente quelques originalités pour l’époque, puisqu’une bonne moitié de l’opus est en quadrichromie, ce qui est extrêmement rare. Autre point d’attention : le système de jeu n’utilise pas de dé, mais des cartes.

Question univers, Château Falkenstein s’inspire des films d’aventure du genre du prisonnier de Zenda et des romans de Jules Verne, avec la magie et les fées en plus. Dans cet univers, les humains et les fées ont passé un accord s’engageant à ne pas guerroyer entre eux, accord que les elfes de la Cour sombre aimeraient rendre caduc, mais sont obligés de respecter. Ils ourdissent dès lors des plans diaboliques pour pousser les humains à se faire la guerre entre eux, et il faut bien admettre que ceux-ci n’ont pas besoin de tant d’incitants que cela.
 
Question système, je vous l’ai dit, Château Falkenstein utilise des cartes plutôt que des dés pour résoudre les tests. Plus étonnant et amusant, il n’y a pas de feuille de personnage, à Château Falkenstein: à la place, vous tenez un journal (à la manière des personnalités de ce temps) dont les premières pages contiennent quelques descripteurs qui définissent les points forts de votre personnage.
 
Le seul défaut du jeu concerne les phases de combat, pour lesquelles Mike Pondsmith est malheureusement retombé dans un travers assez habituel des règles de cette époque, en créant tout un sous-système bien trop compliqué par rapport au reste de la proposition de jeu.
 
Malheureusement, Château Falkenstein n’a pas eu le succès qu’il méritait, du moins en français où seul le premier supplément a été traduit. Même en anglais, il n’y a eu qu’une demi-douzaine de suppléments, ce qui n’est pas énorme. Ce jeu était probablement beaucoup trop en avance sur son temps, et s’il sortait aujourd’hui, gageons qu’il aurait bien plus de succès, avec son approche narrative et son système épuré.

dimanche 2 août 2020

L'Oeil Noir

Allez hop, c’est parti pour une trente-huitième chronique de #1jour1jdr avec un très vieux jeu nous vient de l’Allemagne : je veux bien évidemment parler de l’Oeil Noir. 
A vrai dire, je me suis posé la question de savoir si j’allais vraiment rédiger celle-ci, car après tout, c’est un jeu qui était largement répandu, dans les années 80, et il est donc fort probable que vous le connaissez déjà. Peut-être même beaucoup mieux que moi, qui me suis toujours contenté de la première version du jeu. 
 
Du coup, je vais surtout vous parler de mon expérience avec ce jeu, et pas tellement de son histoire éditoriale, qui me semble un poil compliquée. Sachez juste qu’il y a eu plein d’éditions du jeu en allemand, une traduction française chez Schmidt et Gallimard dans les années 80, et une autre chez BBE, très récemment. C’est aussi un des rares jeux au monde à avoir une traduction en néerlandais. 
 
L’œil noir a été un des premiers jeux de rôle que j’ai acheté, pas trop loin derrière la boîte rouge de D&D et Tunnels & Trolls. La version Gallimard du jeu était disponible en librairie, et donc facilement accessible à tout un chacun, dans sa grosse boîte plastique qui faisait beaucoup de volume pour un contenu pas vraiment à l’avenant. L’œil noir était en effet édité dans la même collection que les fameux livres dont vous êtes le héros, ce qui lui donnait un visibilité assez importante. Mais est-ce que c’était bien ? 
 
Pour être tout à fait honnête, je ne me souviens pas l’avoir pratiqué énormément à l’époque de se sortie, et ce n’est qu’il y a 6-7 ans que je l’ai ressorti du placard pour faire jouer mes enfants, en utilisant les scénarios officiels de la gamme… Et après avoir fait jouer une demi-douzaine de scénarios aux kids, en commençant par la fameuse Auberge du Sanglier Noir, et en avançant dans les différentes publications françaises, je trouve que ce vieux jeu n’a absolument pas à rougir, même comparé aux productions récentes orientées vers l’initiation au jeu de rôle. 
 
Dans tous les cas, j’ai décidé de le conserver dans ma ludothèque pendant quelques années encore : on ne sait jamais, mes petits-enfants voudront peut-être l’essayer aux aussi…

samedi 1 août 2020

Premières Légendes Celtiques

Alors que je me lance dans l’écriture de cette trente-septième chronique de #1jour1jdr je ne peux m’empêcher de penser à celle que mon prédécesseur a écrite sur Légendes, car je vais ici vous parler de sa version simplifiée: Premières Légendes Celtiques.
 
 
Bon, essayons de faire un peu d’histoire. Jeux Descartes a d’abord sorti Légendes en 1983, et c’est un jeu superbe mais dont les règles sont beaucoup trop complexes pour qu’il ait une chance de percer, et en 1987, la même équipe publie “premières légendes”, parce qu’ils ont réalisé entretemps qu’ils avaient été trop ambitieux en publiant Légendes, qui est, selon leurs propres mots, arrivé “trop tôt sur le marché”. 
 
Bon, je veux pas tirer sur l’ambulance, hein, mais Légendes, c’était tout de même quatre heures de calculs laborieux pour parvenir à créer un personnage sur une feuille en quatre volets A4 écrits petits. Sans aller jusqu’à dire que le jeu était impossible à maîtriser, il avait tout de même de très gros défauts.
Mais du coup, Premières Légendes, qu’est-ce que ça vaut au final? J’y viens, impatient lecteur, j’y viens...
 
Mais avant, une anecdote personnelle: je suis tombé il y a quelques années sur “Même pas mort”, le premier volume de la saga “Rois du Monde” de Jaworski, et à la lecture, je me dis immédiatement qu’il y a un truc à jouer, en maîtrisant des histoires un peu mythiques que je pourrais lier à certains événements des romans. Alors, bien sûr, dans ma ludothèque, j’ai le fameux Légendes, dont je ne me souviens que trop bien, et si dans les années 1990, j’avais tenté la maîtrise de ce monstre, ce n’est plus du tout ma came aujourd’hui. Du coup, je me mets en quête d’un exemplaire de “premières légendes” qui a la réputation d’être beaucoup plus simple, et il se trouve qu’un vieux camarade dispose d’un exemplaire en rab’ qu’il me refile en me disant tout de go: “j’aimerais y jouer”... Me voilà donc en train de potasser ces règles en espérant être à la hauteur, puis à compulser les scénarios de la gamme pour voir ce qu’ils valent, puis à bouquiner plein de livres d’histoire et de mythologie sur les celtes... Pour enfin faire jouer une dizaine de sessions environ.
 
J’aimerais bien vous dire que Première Légendes est la version simplifiée de son grand frère, mais sincèrement, ce ne serait pas lui faire honneur. Il s’agit au final d’un jeu tellement différent qu’on peut légitimement se demander pourquoi Jeux Descartes a choisi d’en conserver le nom: il aurait mieux valu en changer pour effacer les stigmates laissés par son aîné. 
 
Question règles, Premières Légendes prend le pli d’offrir des règles de base extrêmement simplifiées et de proposer en règles optionnelles tout ce qui peut ralentir l’action: localisation et détails des blessures, coups critiques, tout ça se trouve dans des encadrés gris, qui peuvent être ignorés dans un premier temps (ou même dans un second temps, en ce qui me concerne). 
 
Malgré cette simplicité, un certain nombre d’éléments du système de jeu sont plutôt avant-gardistes: ainsi par exemple, il n’y a pas d’initiative en combat, et toutes les actions se résolvent au même moment, ce qui fait que deux combattants peuvent très bien s’entretuer sur le champ de bataille, s’ils y mettent du leur. Autre truc sympa: les sortilèges font perdre de la fatigue aux jeteurs de sorts, fatigue qui sert également de points de vie. Autant dire que les magiciens de Premières Légendes Celtiques ont intérêt à se ménager s’ils veulent faire de vieux os. 
 
En pratique, tout ça tourne plutôt bien, et conviendra aux maîtres de jeu les plus exigeants. Bon, pour chipoter, je me dois de souligner que les marges de réussites, c’est pas ce qu’il y a de plus simple à appliquer en pratique, mais un maître de jeu intelligent peut bidouiller assez facilement le système pour éliminer ce genre de calcul en prenant simplement en compte le résultat brut du dé... 
 
Quant à l’univers, on est dans une vision fantasmée de l’histoire de l’univers celtique, et il est certain qu’un historien un peu rigoureux s’arracherait les cheveux devant les inepties qu’on peut trouver dans certains scénarios. Premières Légendes Celtiques n’est donc pas un jeu historique, et il vaut mieux ne pas le prendre comme tel. C’est plutôt un jeu mythologique, et cet aspect ressort particulièrement de la liste des monstres... mais aussi de celles des sortilèges, que je vous recommande de lire très attentivement, car ils sont très évocateurs, et peuvent être le moteurs de fabuleux récits.
 
Bon, vous l’aurez compris, la redécouverte de ce jeu a été pour moi une excellente surprise, et j’espère que je vous aurai donné un peu envie de vous pencher dessus.

vendredi 31 juillet 2020

Dungeon World

Pour cette trente-sixième chronique de #1jour1jdr je vais aborder un quatrième (et dernier, je vous rassure) jeu propulsé par l’apocalypse: Dungeon World. 
 
Vous connaissez tous Donjons & Dragons, et tous les jeux assimilés, avec des héros de fantasy qui luttent contre le mal à la force de leurs épées et de leurs sortilèges, explorent des donjons, ramènent des trésors et des objets magiques, etc. Et vous connaissez peut-être aussi Apocalypse World, qui a une proposition de jeu diamétralement opposée avec des mécanismes narratifs et des conflits entre personnages joueurs.
 
A priori, on imagine difficilement comment réconcilier ces deux idées en un seul jeu, mais ça n’a pas empêché les concepteurs de Dungeon World de se lancer dans ce challenge et d’adapter les concepts de D&D à la mécanique d’Apocalypse World... 
 
Et assez étonnamment, ça fonctionne plutôt bien. Il faut dire que le concept des classes de personnages est finalement assez proche de l’idée des playbooks chers aux PbtA. Les auteurs sont donc partis de cette base et ont conçu des manoeuvres adaptées à l’exploration de donjons et aux autres tropes du plus ancien des jeux de rôles (en ce compris le feu de camp qui permet notamment de se reposer, mais aussi de “monter de niveau”). 
 
Alors, bien sûr, c’est pas du tout le même type de plaisir: Dungeon World sera parfait pour vous permettre de maîtriser ce type de aventures de façon plus narrative, presque sans préparation... Si vous aimez les déplacements au mètre près sur des battlemaps quadrillées, ce jeu n’est certainement pas fait pour vous.

jeudi 30 juillet 2020

Simulacres

Trente-cinquième épisode de #1jour1jdr : alors que je fais un peu le point sur le nombre de jeux qu’il me reste à vous présenter et qui rentrent dans mes critères (y avoir joué au moins une fois et les posséder), je me rends compte que je vais pouvoir atteindre le chiffre magique de 42 chroniques sans trop forcer, ce qui me paraît plutôt pas mal, et du coup, je m’arrêterai à ce chiffre rond, en hommage au regretté Douglas Adams... Aujourd’hui, je vais vous parler d’un autre jeu générique que j’ai beaucoup pratiqué das les années 90: il s’agit de Simulacres.

 
Simulacres est un jeu écrit par Pierre Rosenthal qui a été - à ma connaissance - publié pour la première fois par... les humanoïdes associés sous la forme d’un petit livret de 32 pages intitulé “La fleur de l’Asiamar” offert avec les BD Alef-Thau, de Jodorowsky et Arno. 
 
La première version la plus connue de ce jeu est cependant le hors-série numéro un de Casus Belli avec sa couverture jaune inimitable, édité en 1988. Il y a eu d’autres éditions du jeu, ainsi que des univers motorisés par ces règles et publiés en marge de Casus Belli (Capitaine Vaudou reste le plus connu de ces opus). Les fans ont aussi produit pas mal de contenu, vendus à l’époque par correspondance via la page des petites annonces du magazine... Actuellement, Pierre en est à la version 8 de son système, et le partage régulièrement via un groupe Facebook dédié à la chose. 
 
Bon, alors, comment il fonctionne, ce système ? A vrai dire, entre les différentes versions du jeu, il y a eu des évolutions, mais le principe reste toujours le même: les personnages sont définis par des “composantes” (corps, instinct, coeur, esprit), des “moyens” (perception, action, désir, résistance) et des “règnes” qui représentent leur rapport au monde (minéral, végétal, animal, humain, mécanique). Si on doit faire un jet, on additionne la composante, le moyen et le règne ad-hoc auquel on ajoute une difficulté (qui va entre -4 et +4), et il faut faire avec 2d6 en-dessous du chiffre obtenu pour réussir.
 
Dans sa version jaune, le jeu propose sept “univers” et autant de scénarios - avec personnages prétirés - pour faire découvrir le jeu de rôle rapidement à un public vaguement intéressé et toujours consentant. Bref, ce jeu est fait pour “l’initiation”, comme indiqué sur sa couverture. C’était avant Mireille Dumas: aujourd’hui, on dirait “démonstration”.
 
S’il n’était pas totalement exempt de défauts, Simulacres était un bon petit système pour maîtriser sur le pouce. Depuis lors, je pense qu’on a fait un peu mieux dans le genre, mais à l’époque de sa sortie, c’était pratiquement le seul à proposer ce genre de choses...

mercredi 29 juillet 2020

COPS

Pour ce trente-quatrième épisode de #1jour1jdr je vais évoquer un autre jeu qui trône dans ma ludothèque et est honteusement sous-utilisé: il s’agit de COPS. 

COPS est un jeu qui a été édité par Siroz en 2003, et qui a connu pas moins de 17 suppléments, écran compris, ce qui est plutôt un bon palmarès pour un jeu de rôle français. Comme son nom l’indique, COPS vous propose d’incarner des policiers, mais propose pour cela un setting original: une Californie dans un futur proche, de 2030 à 2035. 

Bon, si on y joue dans 10 ans, on pourra parler d’uchronie, vu que la Californie de COPS a fait sécession du reste des Etats-Unis et dispose donc d’institutions spécifiques, ce qui fait que les forces de police de Los Angeles ont beaucoup plus de pouvoirs et de compétences que dans la vraie vie... 

Dans COPS, vous jouez des policiers d’élite, qui font partie d’une force de police spéciale qui peut se saisir d’à peu près n’importe quelle affaire, juste comme ça. Ce type de fonctionnement et de répartition des tâches n’a absolument aucun sens, mais au final on s’en fout parce que ça va vous permettre à vous, maître de jeu, de confier des enquêtes de toutes sortes à vos PJs, depuis l’assassinat jusqu’au trafic de drogue, pendant que les flics des départements spécialisés dans ce genre de chose font... ma foi, on ne sait pas trop. Je suppose qu’ils mangent des donuts et rédigent des rapports. Un truc comme ça, sûrement. 

Bon, je sais, j’ai l’air critique comme ça, mais en vrai, ça fonctionne plutôt bien cette histoire. Le système de COPS est assez contre-intuitif, puisque les meilleures compétences sont les compétences les plus basses, alors que les meilleures caractéristiques sont les caractéristiques les plus élevées... Le jeu utilise un système où on lance les dés de la caractéristique et où on essaie de battre le score de la compétence. On finit par s’y faire, mais au début, c’est déstabilisant. Ajoutez à ça un système de postures lors des combats qui va permettre à vos super-flics de comprendre très rapidement qu’il vaut mieux rester à couvert si on veut faire de vieux os, mais qui est tellement compliqué en pratique que la plupart des MJ de ma connaissance ont décidé de s’en passer. Ce qui est triste, mais compréhensible. 

Je veux par contre tirer mon chapeau au système de création de personnage qui permet de créer des policiers très variés, avec des origines sociales très différentes. Les stages de police qui permettent aux agents de gagner des petits bonus divers sont également très sympas. 

Si le background criminel de COPS est déjà bien brossé dans le premier supplément du jeu, c’est au fur et à mesure de la publication des autres volumes de la gamme que les différents aspects de l’univers de jeu ont été détaillés: drogue, gangs, mafieux, sectes, presse, espions, tout y passe... Clairement, les auteurs ont eu une vision quasi encyclopédique de leur jeu, et rien qu’avec les six premiers suppléments, vous allez en avoir pour des années de jeu...

mardi 28 juillet 2020

Metal Adventures

 

Si vous êtes comme moi, de la génération Dorothée, cette pétillante présentatrice qui fit de nos mercredi après-midi des moments de détente et de joie, vous avez probablement regardé des centaines d’épisodes d’anime plus ou moins bien doublés, et parmi ceux-ci, vous gardez peut-être des souvenirs émus d’Albator, ce pirate trop stylé qui se déplaçait dans un vaisseau spatial tout aussi stylé, d’ailleurs... C’est probablement la raison qui explique que nous nous sommes tous plus ou moins jetés sur le jeu de rôle qui va faire l’objet de ma trente-troisième chronique de #1jour1jdr : Metal Adventures. 

Metal Adventures est un jeu de rôle d’Arnaud Cuidet qui a été publié par le Matagot en 2009, et qui se décline sur une gamme d’une dizaine de beaux ouvrages cartonnés et abondamment illustrés. Tout ce que nous aimons, en somme. Je crois qu’il y a eu un foulancement pour une deuxième édition, mais je ne sais pas s’il a eu le succès espéré. 
 
La promesse de Metal Adventures consiste à nous faire vivre la vie de pirates de l’espace qui, à l’instar du fameux Albator, refusent de vivre sous le joug des gouvernements planétaires et préfèrent être libres, parmi les étoiles. Bon, il faut dire aussi que les grandes puissances spatiales de ce futur très éloigné (50.000 ans, tout de même) ont une tendance assez nette à l’autoritarisme, à l’exception de la ligue des planètes libres, dont on sent bien qu’elles ne vont pas faire long feu une fois que les autres se seront enfin départagés. 
 
Quoiqu’il en soit, vous voilà membre d’un équipage de pirate, avec chacun une fonction à bord, et prêts à embarquer pour une aventure épique dans les étoiles. Et il faut bien dire que la campagne officielle de Metal Adventures a effectivement tous les ingrédients nécessaires pour vous rester en mémoire, en ce compris des méchants au look complètement ridicule et donc parfaitement dans le ton (si je la fais jouer, c’est malgré tout la première chose que je changerai)... Alors, tout n’est pas rose, tout de même: pour avoir l’intégralité de la campagne, il va falloir vous farcir l’ensemble des suppléments de la gamme, qui vont, tour à tour, vous donner au compte goutte les scénarios qui la composent. Je vous l’avoue, cette technique de publication me saoûle au plus haut point, et je préfère de très loin les produits finis livrés en un seul bouquin.
 
Bon, mais quid du système? Le coeur de la mécanique n’a absolument rien d’original, mais tourne plutôt bien: on lance un nombre de dés équivalent à la compétence dédiée, on compte les succès, et on compare au niveau de difficulté. Rien de bien compliqué, mais comme c’est un jeu d’Arnaud Cuidet, vous trouverez aussi des règles très techniques dès le moment où on entrera en phase de combat, ou pire, de combat spatial... Je vous avoue que j’ai trouvé ce dernier très compliqué à mettre en oeuvre lors des quelques parties que j’ai maîtrisées. Encore un point sur lequel je devrai me pencher la prochaine fois que je m’attellerai à y jouer.
 
Alors voilà, si vous êtes fans d’Albator et de tous les dessins animés de ce style, il y a des chances que Metal Adventures fasse vibrer une fibre nostalgique dans votre petit coeur tout rabougri. Ou pas. On ne peut jamais savoir. 
 
Sur ce, je vous souhaite une bonne journée.

lundi 27 juillet 2020

Hexagon Universe

J’enfile à nouveau mon costume de lycra pour ce trente-deuxième épisode de #1jour1jdr afin de vous présenter un autre jeu de rôle de super-héros, de création française cette fois : il s’agit de Hexagon Universe, un jeu de rôle de Romain d’Huissier.
Comme son nom l’indique, Hexagon Universe est un jeu qui repose sur des bandes dessinées de héros de création française, à l’origine éditées par Lug. On doit à cet éditeur des titres mythiques comme Strange et Titans, mais aussi des trucs moins connus comme Zembla, une sorte de clone de Tarzan, ou Wampus, qui raconte les aventures improbables d’un extra-terrestre qui sacrifie des humains à sa déité, et tout un tas d’autres titres méconnus du grand public. Tout ça s’était enfoncé dans l’oubli jusqu’à ce que les éditions Rivière Blanche rééditent un certain nombre de ces titres et poussent même le vice jusqu’à en produire de nouvelles…
 
Bon, soyons clair, je n’ai pas, quant à moi, poussé le vice jusqu’à me procurer ces BD, que j’ai probablement compulsées lorsque j’étais enfant, puisque c’est typiquement le genre de production à deux francs et trois sous que ma grand-mère se laissait parfois aller à m’offrir quand on faisait une excursion jusqu’à la librairie de son village… Il y a ainsi des nostalgies qu’on n’a pas trop envie de confronter à la réalité.
 
J’ai par contre acquis l’entièreté de la collection Hexagon publiées chez les XII singes à l’occasion de l’acquisition d’un très gros lot de jeux de rôles bradés par un roliste pressé de délester ses étagères, et même si à l’origine, je ne pensais pas lire Hexagon en priorité, je l’ai sélectionné lorsque j’ai imaginé maîtrisé quelques scénarios de super-héros dans mon club de jeu, et finalement, il a tellement bien fonctionné que je l’ai utilisé ensuite pour maîtriser en vacances à mes enfants, qui s’en sont à leur tour emparés pour faire jouer leurs amis. Ma fille cadette (11 ans à l’époque) a par la suite passé un temps fou à constituer des équipes de super-héroïnes thématiques, avec dessin, historique et tout ce qui va bien. 
 
Bon, c’est pas tout ça, mais comment ça marche, au juste, Hexagon ? La force de ce jeu, c’est de proposer un système assez simple avec une feuille de personnage relativement épurée, les personnages étant définis par des motivations, des talents et des pouvoirs. Lorsqu’on veut accomplir une action, on sélectionne un élément de chacune de ces catégories (ce n’est pas toujours possible) et on constitue un pool de dés, qui sont jetés : les résultats de 4 à 6 constituent des succès, qui sont comparés à un seuil de difficulté, ou au résultat d’un autre lancer en cas d’opposition. L’un dans l’autre, tout ça est très fluide et fonctionne plutôt bien. 
 
Entendons-nous bien : si vous recherchez un système crunchy avec plein d’options et de détails, Hexagon n'est pas ce qu’il vous faut. Mais pour faire du jeu de rôle de super-héros à la cool, sans trop se prendre la tête, il est juste parfait.

dimanche 26 juillet 2020

Rêve de Dragon

Pour ma trente-et-unième chronique de #1jour1jdr je vais revenir sur un jeu de fantasy de création française qui refait surface régulièrement, et qui a tendance à diviser les rolistes : il s’agit de Rêve de Dragon.
Rêve de Dragon est un jeu écrit par Denis Gerfaud (à qui l’on doit également Hystoire de fou) et dont la première édition remonte à 1985. Il est d’abord édité aux Nouvelles éditions fantastiques, et va connaître un certain nombre de scénarios pour cette version, publiés dans les « miroirs des terres médianes », les suppléments officiels, mais aussi dans les magazines Dragon Radieux et Casus Belli. 
 
Ensuite, il est repris par Multisim, qui va publier une deuxième édition sous forme de coffret, puis sous la forme d’un gros bouquin à couverture cartonnée ou souple, selon les impressions. Multisim continuera la publication de scénarios, appelés « voyages ». C’est Florence Magnin qui s’occupe des illustrations de couverture. Multisim éditera également Oniros, une version légèrement simplifiée du système. Enfin, le Scriptarium nous a offert récemment une splendide réédition toute en quadrichromie, avec en annexe un recueil de scénarios qui compile une grosse partie de ceux qui avaient été publiés dans les magazines Casus Belli et Dragon Radieux.

L’univers de Rêve de Dragon est assez particulier : nous sommes dans de la low-fantasy, et les personnages sont de simples voyageurs qui vont de village en village et de ville en ville. Point question ici de quête épique pour sauver le monde du Mal™ qui s’étend. A la place, la recherche d’un passé perdu, et un monde onirique rêvé par les Dragons… Ce point est assez essentiel : le monde est un rêve de dragons. Chaque personnage est donc le fragment d’un rêve de ces créatures mythiques et fabuleuses, et lorsque le personnage meurt, ça veut simplement dire que le dragon s’est réveillé. Il va se rendormir, et le personnage va réapparaître, ailleurs, un peu différent, mais pourtant familier (on y reviendra). Dans un passé lointain de ce monde, les magiciens, appelés haut-rêvants, ont un peu trop altéré la structure du rêve, et il est advenu que les dragons se sont réveillés en masse, créant des fractures dans le monde du rêve, qu’on appelle des déchirures. Aujourd’hui, le monde est divisé en poches oniriques de taille variables, connectées entre elles par les déchirures et par le gris rêve. Les gens ordinaires ne savent guère ce qui existe au-delà de la frontière de son propre village, et c’est pour répondre à cette question que la coutume du voyage a été instaurée : elle impose aux jeunes gens de chaque village de quitter celui-ci et de parcourir le monde, ne fut-ce qu’un peu, pour repousser les frontières de l’inconnu. Certains ne vont que jusqu’au village voisin, d’autres en font le projet de toute une vie, et deviennent des voyageurs.
 
Question système, Rêve de Dragon utilise un système assez classique avec une table de résolution et des dés de pourcentage. Particularité de ce jeu : il n’a pratiquement pas évolué entre la première et la troisième édition. A tort ou à raison, Denis Gerfaud considère que ses règles de jeu ne nécessitent pas de refonte et restent tout à fait adaptées au propos du jeu. Vous allez pouvoir vous lâcher dans les commentaires : je pense pour ma part que dès l’origine, les règles de ce jeu n’étaient pas adaptées à son propos, car elles ne font pas transparaître grand-chose de l’onirisme de son univers. Si Denis Gerfaud est un merveilleux scénariste, c’est un bien piètre concepteur de jeu. Ceci dit, je ne peux pas totalement lui jeter la pierre, vu qu’en toute honnêteté, je ne sais pas trop par où je commencerais si je devais concevoir un système qui collerait mieux au propos. Je vous laisse donner vos suggestions de systèmes alternatifs en commentaires.
 
Bon, à ce stade, vous vous demandez probablement pourquoi je vous parle de ce jeu, si je n’en apprécie pas particulièrement les règles... C’est que, vraiment, tout le reste est très bien : l’univers et les scénarios donnent vraiment envie de s’y mettre, et si le jeu est encore dans ma bibliothèque après toutes ces années, c’est exclusivement pour la richesse de son setting.
 
Par ailleurs, je me dois de reconnaître un certain génie dans la façon dont Denis Gerfaud a adapté les mécanismes de son univers qui ont manifestement été pensés pour le jeu de rôle. Le voyage permet de s’assurer que les aventuriers ne vont jamais vraiment se poser, qu’ils vont aller d’aventure en aventure. Les archétypes vont permettre aux joueurs dont le personnage meurt de recréer un nouveau personnage en conservant une partie de ses acquis, ce qui évite le problème qu’on peut avoir dans d’autres jeux lorsqu’un perso de niveau 1 débarque dans un groupe de niveaux 4. Les déchirures et le gris rêve permettent d’amener les personnages très rapidement vers le lieu du prochain scénario, sans trop se soucier de cohérence. On peut même faire un parallèle entre les joueurs qui interprètent leur personnage et les dragons qui rêvent les aventures de ces derniers. 
 
Tout ça, c’est plutôt bien vu, et ça explique pourquoi je conserve encore ce jeu aujourd’hui, après avoir fait une tentative de maîtrise, dans les années quatre-vingt et avoir joué une partie d’Oniros dans les années nonantes. Un jour prochain, peut-être que j’arriverai à le mettre en scène avec succès et à utiliser tout ce matériel… On peut rêver, non ?

samedi 25 juillet 2020

Spirit of 77

Pour la trentième capsule de #1jour1jdr je vais vous présenter un autre jeu de rôle de ma collection qui est propulsé par l’apocalypse, mais qui est beaucoup moins typé que la plupart des jeux de cette mouvance : il s’agit de Spirit of 77.
 
 
Alors, de quoi s’agit-il ? Tous les vieux grognards se souviennent des bonnes vieilles séries télé californiennes du dimanche après-midi : les drôles de dames, l’homme qui vallait 3 milliards, Kung-Fu, Starsky & Hutch, L’homme qui tombe à pic, Court après moi Shériff, etc. 
 
Spirit of 77 tente de capturer l’esprit de cette époque et de nous proposer un jeu de rôle qui nous permettra d’émuler des fictions pleines de méchants sournois et de héros avec un problème d’attitude, le tout sur une musique d’époque… A vous les costumes tout en strass et paillettes, les scènes d’actions et les courses-poursuites au son du funk, du disco ou du rock : c’est l’occasion rêvée de revisiter la discographie de cette période pour sonoriser vos parties.
 
 
 
Alors, autant le dire tout de suite, en ce qui concerne le moteur même du jeu, Spirit of 77 a réalisé un travail minimal d’adaptation des moves d’Apocalypse World, et il faut bien dire que c’est pas ce que j’ai vu de plus inspiré sur le marché. 
 
Par contre, l’approche utilisée pour assembler les livrets de personnages est plutôt intéressante : la création se fait en effet en assemblant une feuille d’historique et une feuille de rôle. La première permet de savoir d’où vient le personnage, quel est son passé : ancien flic, pratiquant du kung-fu, ancien taulard, star, vétéran de guerre, etc. La seconde permet de cerner le type de personnage joué : chef de bande, séducteur, gros dur, détective, etc. A noter que les extensions du jeu offrent des profils supplémentaires, ce qui permet d’avoir une plus large variété de choix.
 
 
Alors, comme dans tous les PbtA, la sélection des différents profils va être un moment assez important pour déterminer à quelle genre de campagne on va avoir à faire : la présence d’un détective à table vous entraînera nécessairement dans des enquêtes, par exemple. En choisissant les bons profils et les bons historiques, il est tout à fait possible de recréer les héros de vos séries préférées : j’ai pu ainsi créer les « drôles de dames » sans grande difficulté. Si vous vous lancez avec ce jeu, je vous recommande chaudement de bien encadrer cette étape, pour avoir des personnages qui fonctionneront bien ensemble et orienteront la fiction dans une direction intéressante. 
 
Par contre, contrairement à ce qu’on voit dans d’autres PbtA, Spirit of 77 se prête assez bien à la maîtrise de scénarios plus ou moins traditionnels, et la gamme de ce jeu en propose d’ailleurs un certain nombre, sur des thématiques assez variées, depuis l’organisation de l’évasion d’une détenue d’une prison pour femme gérée par des singes-gardiens jusqu’au chaos provoqué par l’apparition des stars d’une série télévisée à succès à une convention de science-fiction… Dans ce sens, Spirit of 77 est peut-être bien le plus traditionnel des PbtA.
 
Bonne lecture… et bonne écoute !
 
 

vendredi 24 juillet 2020

Sang & Honneur

 

Pour cette vingt-neuvième chronique de #1jour1jdr je vais revenir sur un jeu relativement récent et, à mon estime, injustement méconnu. Il s’agit de Sang & Honneur, de John Wick.

 
Vous avez tous entendu parler de John Wick. Je ne parle pas du personnage de tueur mafieux à la retraite qui part en vrille quand on tue son chien, mais de l’auteur américain assez prolifique qui nous a donné à la fois Le Livre des 5 Anneaux, les secrets de la 7ième Mer, et Dieux Ennemis ainsi qu’un certain nombre de trucs et astuces pour maîtriser (rassemblés dans deux petits volumes intitulés Dirty MJ). 
 
Parmi ses créations moins connues figurent House of the Blooded et sa version japanisante, Blood & Honor, traduit en français par Arkhane Asylum Publishing sous le titre Sang & Honneur.
En ce qui concerne la forme, Sang & Honneur est un petit livre de 240 pages, au format A5, très pratique à transporter et à utiliser. 
 
Le background du jeu est relativement flou : vous allez jouer des histoires de Samouraï, et plus précisément gérer l’évolution d’un clan dans un Japon médiéval fantasmé : autrement dit, le jeu ne se veut absolument pas historique ni réaliste. Vous allez jouer des haut-fonctionnaires du Clan, proches du Seigneur qui le dirige : général, bourreau, espion en chef, courtisan, etc.
 
Mais alors, si le background n’est pas extraordinaire, pourquoi je vous en parle ? Ce jeu vaut particulièrement le détour pour son approche des règles de jeu. Alors, attention, j’aime autant vous prévenir, si vous êtes fans du jeu de rôle à papa (ou à fortiori, à grand-papa), Sang & Honneur va vous bousculer rudement dans vos habitudes, et va peut-être même vous paraître daubé ou sans saveur (petite parentèse ironique : j’ai trop hâte de lire vos commentaires disruptifs à ce propos). Mais trêve de préliminaires et de précautions oratoires, passons au plat de résistance.
 
Dans Sang & Honneur, l’objet du lancer de dé n’est PAS de déterminer si l’action entreprise par un personnage réussit. L’objet de ce lancer va être la prise de parole. Si le jet de dé dépasse le seuil fixé, le joueur qui a remporté le jet décide de ce qui se passe, et prend le contrôle de la narration. Il peut décider que l’action réussit, qu’elle rate, et plein d’autres petits détails. A l’inverse, si le jet est raté, c’est le meneur de jeu qui prend la main… Et lui aussi, peut choisir dans quel sens la narration se dirige...
 
Bon, je vous sens confus, et vous vous dites sans doute : « à quoi bon, tout ça, les joueurs vont toujours vouloir que leur perso réussisse et ce sera l’inverse pour le meneur ? ». C’est pas tout à fait faux. Mais vous partez du principe que les personnages des joueurs vont être tout le temps d’accord entre eux. Or, c’est pas nécessairement le cas : chaque membre du clan peut avoir des intérêts qui lui sont propres et vouloir prendre le contrôle de la narration sur un autre PJ, ce qui va entraîner son lot de drama.
 
Par ailleurs, TOUS les jets répondent à cette règle, en ce compris les jets de connaissance du monde. Prenons un exemple : le maître de jeu vous décrit une matinée comme les autres, au château de votre seigneur, quand soudain, un visiteur se présente à la porte du château. Un joueur demande : est-ce que je connais cette personne ? Le maître de jeu lui fait lancer un jet de sagesse, qu’il réussit. Le joueur prend dès lors le contrôle : c’est LUI qui décide s’il connaît la personne, mais aussi le nom de cette personne, sa profession, et l’un ou l’autre détail supplémentaire selon le résultat du jet. 
 
Pour jouer à ce jeu, il va donc vous falloir des joueurs inventifs qui aiment improviser et adopter une posture de « réalisateur » par rapport à leur personnage et à la fiction, et il va falloir que vous appreniez à « lâcher prise », et à préparer vos parties… différemment.
 
Soyons clair, ce jeu n’est pas fait pour tout le monde. Les vieux grognards comme moi ont des difficultés à renoncer à leurs vieilles habitudes, et ont tendance à jouer eur personnage pour « gagner », ce qui n’a que peu d’intérêt dans le cadre de ce système de jeu, car celui-ci est conçu de telle façon que les jets sont « faciles » à remporter, de façon à faire tourner le droit parole et à permettre la construction d’un récit partagé qui soit à la fois prenant et original.

jeudi 23 juillet 2020

Blue Planet

#1jour1jdr – épidose XXVIII
 
 
Nous sommes en 2199. La planète Poséidon, dont la surface est composée à 98% d’eau, est la seule autre planète à la portée de l’humanité, qui a quasiment complètement épuisé les ressources terrestres. Les tensions sont élevées entre les nouveaux colons, qui viennent d’arriver sur Poséidon, et les autochtones, d’anciens colons qui habitent là depuis le premier effort de colonisation de la planète, et avec lesquels le contact a été coupé pendant plus d’un siècle, un temps largement suffisant pour qu’ils régressent technologiquement et bâtissent leur propre culture… Ces tensions sont exacerbées par l’exploitation du "Long John", un minerai rare qu’on ne trouve que sur Poséidon, et qui pourrait détenir la clef de l’immortalité… une ressource que les corporations de la Terre ne sont pas prêtes à laisser inexploitées.
Blue Planet est un jeu de rôle de science-fiction dont la première édition date de 1997 et qui a pour cadre cette "nouvelle frontière". On y retrouve les thèmes de la colonisation, de l’écologie, du transhumanisme (on peut y jouer des humains modifiés, mais également des cétacés qui ont été "élevés") et du pouvoir corrupteur de l’argent cher au cyberpunk. 
 
Je n’y ai malheureusement joué qu’une demi douzaine de séances, il y a plus de 15 ans, mais je garde d’excellent souvenirs de cet univers haut en couleurs. 
 
Le jeu a connu trois éditions en anglais. La première édition de 1997 est de Biohazard Games et reposait sur un système de pourcentages. La deuxième édition de Fantasy Flight Games (2000) reste à ce jour la gamme la plus développée. Il y a eu une troisième édition en 2012, développée par FASA Corporation, qui est passée complètement sous mon radar et dont je ne peux par conséquent pas vous dire grand-chose. Il n’y a malheureusement pas de traduction française de ce jeu.

mercredi 22 juillet 2020

Striscia

 

Le cliquetis des épées qui s’entrechoquent dans les ruelles obscures n’aura plus de secrets pour vous une fois que je vous aurai parlé de Striscia, le vingt-septième jeu de rôle de ma sélection, que ma femme appelle « le jeu des épées »… C’est reparti pour une chronique #1jour1jdr

 
Striscia est un petit jeu de rôle écrit par Alexandre Jeannette, alias Kobayashi, et édité à la demande chez Lulu. Il se présente sous la forme d’un petit livret de 64 pages au format A5 et a pour thème les histoires de spadassin dans une tonalité assez réaliste, avec comme source d’inspiration principale le roman « Gagner la guerre » de Jean-Philippe Jaworski.
 
Dans Striscia, vos personnages sont définis par quatre caractéristiques (habileté, vigueur, astuce et volonté) qui englobent l’ensemble des jets que vous aurez à faire en dehors du combat. A côté de ça, vous avez trois scores liés à cette activité dangereuse : l’attaque, la défense et les points de vie. La création de personnage se fait par répartition de points, et il est donc impossible d’être à la fois bon en attaque et en défense : il va falloir choisir son style de combat, en répartissant ses points entre ces deux scores.
 
Les combats dans Striscia sont rapides et mortels : une bonne rapière fait 2d6 de dommages et vous avez rarement beaucoup plus que 12 points de vie au départ. Si vous jouez de malchance, votre corps sans vie sera bien vite retrouvé dans le caniveau. Certains d’entre vous vont peut-être trouver ça très nul, mais d’expérience, il s’avère que ce type de règles a des effets extrêmement dissuasifs sur l’amorce des hostilités : s’ils veulent survivre assez longtemps, les personnages vont devoir trouver des façons différentes de régler leurs problèmes, la fuite et le dialogue étant des options tout à fait viables.
 
Question univers, Striscia propose de jouer dans la bonne ville de Vicerezzo, une cité fantasmée inspirée des grandes villes de la renaissance italienne. Le setting est à peine esquissé dans le livre de base, mais est beaucoup mieux développé dans le supplément « Mémoires d’un spadassin », qui propose également quelques petits scénarios prêts à jouer (moyennant un peu de préparation supplémentaire).

mardi 21 juillet 2020

Nephilim

Pour cette vingt-sixième chronique de #1jour1jdr je vais m’attaquer à un jeu phare du paysage ludique français, qui a connu cinq éditions, et mis le pied à l’étrier à Multisim : je veux bien entendu parler de Nephilim.

 
Nephilim est un jeu que j’ai principalement connu comme joueur, dans les années 1990, lorsque je jouais à sa deuxième édition, et c’est principalement de cette expérience que je vais vous parler, même si les photos qui accompagnent cet article sont celles de Nephilim Légende, la cinquième édition, sortie il n’y a pas si longtemps.
 
Dans ce jeu, vous incarnez un Nephilim, une sorte de pur esprit élémentaire, qui a été capturé dans un lointain passé et enfermé dans une stase, un objet en apparence tout à fait ordinaire qui l’empêche de parcourir la Terre librement. De temps à autre, les Nephilims parviennent à s’échapper de cette prison magique pour s’incarner dans un être humain, leur simulacre. Incarné dans cet être de chair, ils vont poursuivre leur quête de perfection, l’Agartha, en essayant de rassembler, pièce par pièce, leurs connaissances perdues dans le domaine de la Magie. Le tout en essayant d’échapper aux nombreuses sociétés secrètes qui veulent les éliminer ou les utiliser. Votre Nephilim ayant eu l’occasion de s’incarner à différentes époques de l’histoire de la Terre, il a une mémoire parcellaire de ses incarnations passées, dont il a hérité d’une partie de ses compétences.
 
Les aventures et campagnes de Nephilim tournent donc autour de cette quête occulte et la guerre secrète qui l’accompagne. Les différentes éditions ont été accompagnées de nombreux suppléments de contexte et de campagnes et scénarios qui sont restés dans la mémoire des joueurs qui les ont vécues. J’ai pour ma part une tendresse toute particulière pour le Souffle du Dragon, qui ne m’a pas laissé beaucoup de souvenirs précis, malheureusement.
 
Dans les deux premières éditions de ce jeu, celles que j’ai pratiquées, Nephilim était motorisé par le système Basic, dont Multisim avait acquis la licence auprès de Chaosium. Les éditions suivantes ont chacune proposé leur propre système, chaque fois différent.
 
La toute dernière édition, Nephilim Légende, est publiée par Mnemos. Ils rééditent énormément de matériel ancien, adapté aux nouvelles règles, et ont également produit quelques campagnes supplémentaires. J’ai pour ma part craqué pour le beau gros coffret rempli à craquer de matériel, qui donne de quoi jouer pendant déjà quelques années.

lundi 20 juillet 2020

MEGA

Pour cette vingt-cinquième chronique de #1jour1jdr je vais revenir à un des premiers jeux que j’ai lu et pratiqué, qui était vendu en kiosque comme hors-série de Jeux & Stratégie à l’époque où j’étais encore un ado boutonneux, je veux évidemment parler de MEGA…

MEGA est un jeu de rôle conçu à l’origine par Didier Guiserix et Michel Brassinne, et taillé pour l’initiation… enfin, l’initiation dans les années 80. Autres temps, autres mœurs… Il a connu pas moins de cinq éditions au cours de sa vie éditoriale assez cahoteuse, la dernière en date est publiée par les Editions Leha en 2018. 
 
Chaque édition utilise des règles différentes, et il est donc un peu difficile pour moi de vous faire un aperçu complet de celles-ci dans le cadre de cette chronique. Sachez juste que les deux premières versions du jeu utilisaient un système à base de pourcentage, la troisième édition avait un système de table de résolution et la cinquième et dernière édition a décidé d’utiliser tous les beaux dés spéciaux à plein de faces différentes chers aux rolistes (ou du moins, à Didier Guiserix). Rien de tout ça n’est particulièrement révolutionnaire, et n’en a d’ailleurs jamais eu l’ambition. L’avantage de ces diverses approches, c’est que finalement, il y a probablement quelque part dans le monde une version de MEGA faite pour vous, sauf si vous cherchez quelque chose de moderne, auquel cas vous êtes juste condamnés à aller voir ailleurs. Je garde pour ma part une certaine tendresse pour la deuxième édition, mais c’est purement nostalgique.
 
L’univers de MEGA, c’est une toute autre histoire… et je me rends compte que ça va pas être évident à expliquer… Essayons tout de même.
 
Il était une fois, un Empire Galactique qui devait faire porter ses messages officiels le plus rapidement possible sur des planètes parfois très éloignées. Une agence spécialisée a été créée pour l’occasion : les Messagers Galactiques (en abrégé MEGA), composée de personnes ayant des pouvoirs psychiques assez particuliers : le transfert et le transit. Le transfert permet à un MEGA de « posséder » avec son esprit le corps de quelqu’un d’autre. Le transit permet à un MEGA de se « téléporter » d’un point de transit à un autre, les points de transit étant des sortes de grands tétraèdres construits dans cette perspective. Grâce au transit, un MEGA peut donc passer d’une planète à une autre instantanément, pourvu qu’un point de transit existe sur les deux planètes. Mieux encore, il est possible à un MEGA de se déplacer vers un univers parallèle par ce biais, univers qui peut varier énormément de celui d’origine.
Et la Terre dans tout ça ? Et bien, c’est notre bonne vieille Terre de 2020, qui sert notamment de réservoir de recrutement car, pour une raison inexplicable, une petite proportion de nos contemporains ont des pouvoirs MEGA latents qui n’attendent qu’à être entraînés.
 
Bon, donc, en résumé, on a une agence composée de centaines de Docteur Who en puissance, qui peuvent se déplacer dans l’espace et dans des univers parallèles, ce qui fait qu’avec ce jeu, vous pouvez potentiellement maîtriser à peu près n’importe quoi. Un bon prétexte pour recycler certains scénarios sans nécessairement vous lancer dans une campagne complète. C’est à mon sens la grande force de MEGA, qui dépasse largement son contrat initial de simple jeu d’initiation…