dimanche 26 juillet 2020

Rêve de Dragon

Pour ma trente-et-unième chronique de #1jour1jdr je vais revenir sur un jeu de fantasy de création française qui refait surface régulièrement, et qui a tendance à diviser les rolistes : il s’agit de Rêve de Dragon.
Rêve de Dragon est un jeu écrit par Denis Gerfaud (à qui l’on doit également Hystoire de fou) et dont la première édition remonte à 1985. Il est d’abord édité aux Nouvelles éditions fantastiques, et va connaître un certain nombre de scénarios pour cette version, publiés dans les « miroirs des terres médianes », les suppléments officiels, mais aussi dans les magazines Dragon Radieux et Casus Belli. 
 
Ensuite, il est repris par Multisim, qui va publier une deuxième édition sous forme de coffret, puis sous la forme d’un gros bouquin à couverture cartonnée ou souple, selon les impressions. Multisim continuera la publication de scénarios, appelés « voyages ». C’est Florence Magnin qui s’occupe des illustrations de couverture. Multisim éditera également Oniros, une version légèrement simplifiée du système. Enfin, le Scriptarium nous a offert récemment une splendide réédition toute en quadrichromie, avec en annexe un recueil de scénarios qui compile une grosse partie de ceux qui avaient été publiés dans les magazines Casus Belli et Dragon Radieux.

L’univers de Rêve de Dragon est assez particulier : nous sommes dans de la low-fantasy, et les personnages sont de simples voyageurs qui vont de village en village et de ville en ville. Point question ici de quête épique pour sauver le monde du Mal™ qui s’étend. A la place, la recherche d’un passé perdu, et un monde onirique rêvé par les Dragons… Ce point est assez essentiel : le monde est un rêve de dragons. Chaque personnage est donc le fragment d’un rêve de ces créatures mythiques et fabuleuses, et lorsque le personnage meurt, ça veut simplement dire que le dragon s’est réveillé. Il va se rendormir, et le personnage va réapparaître, ailleurs, un peu différent, mais pourtant familier (on y reviendra). Dans un passé lointain de ce monde, les magiciens, appelés haut-rêvants, ont un peu trop altéré la structure du rêve, et il est advenu que les dragons se sont réveillés en masse, créant des fractures dans le monde du rêve, qu’on appelle des déchirures. Aujourd’hui, le monde est divisé en poches oniriques de taille variables, connectées entre elles par les déchirures et par le gris rêve. Les gens ordinaires ne savent guère ce qui existe au-delà de la frontière de son propre village, et c’est pour répondre à cette question que la coutume du voyage a été instaurée : elle impose aux jeunes gens de chaque village de quitter celui-ci et de parcourir le monde, ne fut-ce qu’un peu, pour repousser les frontières de l’inconnu. Certains ne vont que jusqu’au village voisin, d’autres en font le projet de toute une vie, et deviennent des voyageurs.
 
Question système, Rêve de Dragon utilise un système assez classique avec une table de résolution et des dés de pourcentage. Particularité de ce jeu : il n’a pratiquement pas évolué entre la première et la troisième édition. A tort ou à raison, Denis Gerfaud considère que ses règles de jeu ne nécessitent pas de refonte et restent tout à fait adaptées au propos du jeu. Vous allez pouvoir vous lâcher dans les commentaires : je pense pour ma part que dès l’origine, les règles de ce jeu n’étaient pas adaptées à son propos, car elles ne font pas transparaître grand-chose de l’onirisme de son univers. Si Denis Gerfaud est un merveilleux scénariste, c’est un bien piètre concepteur de jeu. Ceci dit, je ne peux pas totalement lui jeter la pierre, vu qu’en toute honnêteté, je ne sais pas trop par où je commencerais si je devais concevoir un système qui collerait mieux au propos. Je vous laisse donner vos suggestions de systèmes alternatifs en commentaires.
 
Bon, à ce stade, vous vous demandez probablement pourquoi je vous parle de ce jeu, si je n’en apprécie pas particulièrement les règles... C’est que, vraiment, tout le reste est très bien : l’univers et les scénarios donnent vraiment envie de s’y mettre, et si le jeu est encore dans ma bibliothèque après toutes ces années, c’est exclusivement pour la richesse de son setting.
 
Par ailleurs, je me dois de reconnaître un certain génie dans la façon dont Denis Gerfaud a adapté les mécanismes de son univers qui ont manifestement été pensés pour le jeu de rôle. Le voyage permet de s’assurer que les aventuriers ne vont jamais vraiment se poser, qu’ils vont aller d’aventure en aventure. Les archétypes vont permettre aux joueurs dont le personnage meurt de recréer un nouveau personnage en conservant une partie de ses acquis, ce qui évite le problème qu’on peut avoir dans d’autres jeux lorsqu’un perso de niveau 1 débarque dans un groupe de niveaux 4. Les déchirures et le gris rêve permettent d’amener les personnages très rapidement vers le lieu du prochain scénario, sans trop se soucier de cohérence. On peut même faire un parallèle entre les joueurs qui interprètent leur personnage et les dragons qui rêvent les aventures de ces derniers. 
 
Tout ça, c’est plutôt bien vu, et ça explique pourquoi je conserve encore ce jeu aujourd’hui, après avoir fait une tentative de maîtrise, dans les années quatre-vingt et avoir joué une partie d’Oniros dans les années nonantes. Un jour prochain, peut-être que j’arriverai à le mettre en scène avec succès et à utiliser tout ce matériel… On peut rêver, non ?

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